Swell de Spirits, nouveau venu dans le monde des embouteilleurs indépendants, a frappé très fort dans la petite sphère du rhum, avec un très beau Hampden malheureusement déjà épuisé depuis longtemps. Ses embouteillages d’armagnac et de cognac ont été également remarqués, grâce notamment à un design soigné et à des sélections pointues. Nous avons discuté avec Michael Barbaria, le fondateur, un passionné qui nous a emmené à la découverte de son métier :
Salut Michael, merci d’être avec nous, et content de te rencontrer en virtuel, avant peut-être de te voir sur des salons en 2022 ?
J’aimerais bien oui, parce que finalement je connais plus de monde à l’extérieur de la France que chez moi ! J’étais expat les 12 dernières années. Je suis allé en Australie pendant 6 ans, entrecoupé de séjours en Asie, 5 ans en Allemagne. Ma femme est écossaise, et nous avons pas mal voyagé.
Est-ce que tu es à 100% dans les spiritueux aujourd’hui ? Que faisais-tu avant ?
Oui, je suis j’y suis à 100 % depuis avril 2021. Je suis arrivé par la petite porte, au départ je suis un passionné, et j’ai mis le pied à l’étrier l’année dernière.
Swell de Spirits est un projet qui ne s’est pas fait du jour au lendemain. J’ai commencé à travailler dessus quelques années en arrière. À la base je suis ingénieur en aéronautique, j’ai travaillé chez Airbus à Toulouse en tant que sous-traitant. Au bout de trois 3-4 ans, j’en ai eu marre, et je suis parti avec mon sac à dos, destination Australie. Venant d’un petit village au pied des Pyrénées, en Ariège, je me suis dit pourquoi pas quelque chose qui change : la plage, le surf, la voile, boire des bières, faire des barbecues…
Qui peut le plus peut le moins, je suis entré dans l’industrie minière là-bas, et ensuite pour toucher à tout, je suis allé dans le commerce, la construction, les travaux publics, pour revenir en Allemagne et ensuite en France. Ensuite j’ai écourté mon contrat et je me suis lancé à 100 % dans la passion pour essayer d’en vivre.
C’est en revenant en Allemagne et en France que t’es venue cette passion pour les spiritueux, ou ça a toujours été là ?
Ça a toujours été plus ou moins présent, avec ma famille et le côté italien de ma mère : la grappa, le sens de goûter les choses (avec un morceau de sucre étant petit !). Et puis j’ai toujours été attiré par le côté process, la distillation des spiritueux, le scotch whisky. Le rhum est arrivé plus tard, la passion est vraiment venue du scotch whisky, de certains vieux Macallan etc.
J’imagine que tu as dû régulièrement visiter la belle famille du coup !
En effet on peut dire que j’avais tout ce qu’il fallait pour débuter l’embouteillage indépendant !
Donc tes premiers achats pour Swell de Spirits étaient des scotch whiskies…
Oui, j’ai acheté quelques fûts petit à petit. Cela m’intéressait d’aller voir sur place, et à chaque fois j’en avais l’opportunité, lorsque l’on allait voir la famille 4 ou 5 fois par an, je passais beaucoup de temps dans les distilleries. Il y avait pas mal d’occasions d’acheter des fûts directement chez elles.
C’était il y a quelques années en arrière déjà, parce que maintenant c’est très dur. À moins d’avoir un million d’euros pour taper à la porte des distilleries et prétendre à acheter pas mal de tonneaux, ça devient de plus en plus dur. C’est un cercle fermé, il faut connaître pas mal de monde. Ça échange beaucoup, ça deale entre indépendants, distilleries etc. On trouve même des distilleries qui rachètent aux indépendants. Les grosses écuries comme Gordon & MacPhail ont même parfois plus de stocks que les certaines distilleries.
Je suis un passionné de Islay, de Springbank, de Lowlands aussi, notamment de Daftmill, avec Francis Cuthbert que mon beau-frère connaît bien. J’ai aussi pu rencontrer les frères Thompson (Dornoch Distillery, ndlr). Il y a beaucoup de potentiel mais il faut être sur place.
« Cette année il va y avoir beaucoup de sorties de scotch, parce que les fûts arrivent à maturation. »
Il y a pas mal de finish, mais aussi des vieux Single Malt Scotch Whisky dont j’ai voulu garder l’ADN en les laissant dans leurs fûts initiaux, bourbon ou hogshead.
Le rhum est donc arrivé du coup plus tard, j’aime bien les grands arômes, avec Savanna qui avait sorti des fûts de HERR par exemple. J’ai démarré par ça en fait, avec les « chai humide » etc. Côté Irlande, Angleterre, il y a de quoi faire également. Notamment des distilleries en Australie, que j’avais visitées à l’époque. Ensuite il y aussi les rhums agricoles, tout ce qui est martiniquais, guadeloupéens ou autres, des belles cuvées à découvrir, et bien évidemment la mélasse. On se rapproche du côté armagnac, des vieux cognac, dont certains ont un peu de ressemblances avec les vieux rhums.
Je n’ai pas de limites, donc je me suis dit « pourquoi ne pas faire d’autres spiritueux ?». J’ai commencé aussi à m’intéresser au cognac, j’ai passé du temps avec la famille Pasquet, j’ai distillé la bonne chauffe avec eux et découvert la repasse charentaise.
Ainsi j’ai eu l’occasion d’échanger avec les producteurs et personnes proches du terroir, de la vigne, comme avec la famille Claverie (Domaine de Baraillon Bas Armagnac) que je visite souvent et surtout avec qui j’apprends beaucoup sur le sujet.
Dans ma vision de Swell de Spirits, j’ai vraiment envie de prendre le temps et de bien faire les choses, bien sélectionner. Je ne cours pas après quoi que ce soit, il faut se faire plaisir avant tout. Le but est de continuer sur du long terme, en tout cas je fais tout pour. Je touche du bois, pour l’instant c’est bien parti.
« L’objectif de Swell de Spirits est de rendre accessibles de jolies cuvées, autant dans le rhum que le scotch, le cognac, l’armagnac… »
Même si j’ai sorti récemment des cognacs avec des tarifs assez élevés, des années 60, des années 50, des années 20, le but est quand même que ce soit accessible à pas mal de portefeuilles. Mais les tarifs sont souvent alignés sur le tarif d’achat auquel on obtient le fût, et vu le cours des choses, ça ne va pas dans le vert.
Quand as-tu acheté tes premiers fûts ?
Avec mes premiers contacts dans les distilleries, j’avais acheté des choses comme un Ben Nevis 2012. Ce n’était pas un new spirit, car il était déjà sous bois, mais quasiment. Je l’ai affiné par la suite, dans un vieux fût d’oloroso issu d’une vieille bodega. Ce genre de choses est de plus en plus dur à trouver, donc c’est difficile de sortir quelque chose qui soit très accessible. C’est malgré tout sorti à un prix assez raisonnable.
Il y a aussi le souci d’avoir une belle bouteille avec un joli design graphique. C’est Bastien Renard, un passionné du rhum, qui me fait le design. Je l’ai rencontré sur les réseaux sociaux, on a parlé pendant des mois, et dès le début il m’a dit « s’il y a quoi que ce soit je puisse faire au niveau design graphique, n’hésite pas, je suis partant ». Les anciens disent souvent que si l’étiquette est bien faite, le liquide ne suit pas, mais pour le moment j’espère arriver à faire les deux !
En tout cas l’optique de Swell de Spirits est de ne pas se prendre la tête, de prendre la vague.
Justement, « swell » est un terme de surf, c’est bien ça ?
Oui, la définition de Swell, c’est « la houle », le mouvement ondulatoire de l’océan, de la mer. C’est représentatif de l’image de marque que j’ai voulu donner.
Sur la qualité, le design, on essaie de toujours d’aller chercher le détail, quitte à sortir des mois / années plus tard. Il n’y a pas de rush, on n’est pas stressés par le temps. Il ne faut pas non plus se mettre dans le rouge niveau tarif, ne pas acheter quelque chose qui ne rimerait à rien. Tout est goûté, re-goûté, tout est affiné. Sur le rhum, il y a des choses qui sont affinées à l’heure actuelle, des petites créations. Il va y avoir des séries expérimentales qui vont sortir. Ensuite j’aimerais réutiliser des fûts de rhum pour autre chose, et ainsi de suite. Je suis aussi en train de voir pour travailler avec des dames-jeannes, avec du cognac et de l’armagnac.
À ce sujet le fût de Hampden devrait être intéressant !
Exactement, d’ailleurs il est déjà rempli !
En tout cas c’est intéressant d’avoir accès à cette qualité-là, et de rencontrer les producteurs, les distillateurs. Moi je ne fais pas grand-chose en soi avec Swell de Spirits, le plus gros travail a été fait en amont par les distillateurs, par les travailleurs de la terre, de la vigne du côté du cognac et de l’armagnac par exemple. Je vais essayer de mettre de plus en plus l’accent sur l’histoire qui est derrière le produit, par le biais de masterclasses, de présentations, pour partager avant tout l’histoire du liquide, d’où il vient, qui sont les gens derrière etc.
Moi je fais le plus facile, donc il faut vraiment rester humble. Je n’aime pas dire « je », car c’est vraiment « nous », ou même « eux ». Je ne peux pas dire que c’est « mon » embouteillage. Il y a des termes que j’ai du mal à utiliser, et je me focalise de plus en plus sur le fait de rendre hommage à ces gens-là.
Cela rejoint l’idée de « dependent bottler » de Luca Gargano…
Oui, même si pour lui c’est encore autre chose, car il s’implique beaucoup, il fait un sacré travail avec les distillateurs, comme avec Richard Seale par exemple.
En parlant de Richard Seale, n’y aurait-t’il pas un Foursquare qui est sur le point de sortir ?
Oui, un joli Foursquare qui a tout ce qu’il faut pour plaire. Sur le même principe que pour les gens qui cherchaient un <H> et qui ont été servis, on est sur un beau Foursquare, un 2006 avec un vieillissement presque 100 % tropical.
Est-ce que tu as pu rencontrer quelques producteurs des Caraïbes ?
Non malheureusement, c’était prévu, mais ça a été compliqué ces derniers temps. Mais espérons que ça se décante, il y a beaucoup de voyages à faire, notamment la Martinique et la Guadeloupe pour le rhum agricole.
Il va y avoir du travail, car ces distilleries ne sont pas faciles à convaincre !
Oui, les premiers contacts n’ont pas toujours été faciles, j’ai vite compris avec certaines distilleries que ce ne serait pas possible. Mais ça se comprend, ils veulent garder leurs trésors. D’autres sont un peu plus ouvertes, donc on est en train de discuter, il y a des projets.
Pour revenir aux spiritueux de métropole, est-ce que tu peux nous reparler du calvados que tu as embouteillé ?
Il s’agit d’un AOC Calvados de la distillerie Garnier, une distillerie familiale, de père en fils. On est vraiment sur une petite production, 100 % pomme, qui sort une quinzaine de fûts par an. Ils pratiquent surtout de l’assemblage, et ne sortent pas de single cask. Il y a 3 chais qui sont très intéressants, dont un chai sec, orienté sud, et un plus humide, côté nord.
Pour la distillation, ils utilisent une colonne continue des années 1920-1930, un peu comme dans l’armagnac, chauffée au gaz. Pour l’AOC Pays d’Auge en revanche, la distillation doit se faire en alambic.
Ce qu’il faut savoir, c’est que pour faire du vieux calvados, il faut distiller un cidre qui a vieilli en cuve pendant un an. Donc ce qui a été distillé cette année, en pleine période, fin décembre – début janvier, est un cidre qui est resté en cuve et qui a déjà formé une couche en surface. Il sort autour des 65-70 % de la colonne, et il peut être mis en fût neuf pendant un an, pour le charger en tanins. Ensuite il est passé dans de vieux fûts.
« Celui que j’ai choisi est un fût qui vient du chai humide. »
Ce chai arrondit beaucoup et donne des notes pâtissières. L’hiver, il y a quelques centimètres d’eau au pied des tonneaux, et il y a une odeur de champignons. Il y avait quelques fûts qui étaient assez extrêmes, mais ce 18 ans d’âge est très bien fait.
Pour tout te dire, je suis arrivé là-bas sans connaître grand-chose. Je connaissais le trou normand, mais je n’avais jamais trop poussé. J’avais goûté quelques bons single casks de chez Drouin ou Breuil, mais la sélection d’un fût me semblait compliquée.
“Et puis après tout, avec le fait de voir les vergers, la cueillette des pommes, de découvrir toutes leurs variétés (plus de 200 !), de voir la distillation, je me suis dit pourquoi pas !”
Ce qui est aussi intéressant à voir, c’est une sorte de canal, avec des pommes portées par l’eau. Certaines distilleries jouent avec le courant, et les pommes montent sur un tapis où elles sont triées. Ensuite elles montent directement dans la presse. Tout est vraiment artisanal, le terroir est très beau.
On retrouve la philosophie que Luca Gargano avait développée dans le passé, c’est-à-dire développer une gamme avec des single casks, des éditions limitées, du travail avec les fûts, voir ce qui peut-être amélioré au niveau de la distillation, etc.
On a beaucoup discuté avec Nicolas Garnier, il est ouvert aux expérimentations. Pour l’instant, la gamme est composée de la Fine, du 6 ans, 12 ans et 20 ans, et tout est assemblé. Mais il veut peut-être plus tard sortir des fûts uniques, etc.
Je me suis rendu compte au moment des fêtes qu’il y avait de la demande. Avoir une bouteille de calvados sur la table à ce moment là est plutôt agréable ! Je n’avais pas vu venir ça, j’ai vendu tout cet embouteillage en une semaine, et j’ai eu beaucoup de bons retours par la suite.
C’est aussi l’occasion de dépoussiérer l’image du calvados…
Oui, c’est pour ça qu’on a voulu sortir quelque chose de funky, avec un design qui sort de l’ordinaire pour le calvados. Cela a attiré un peu les regards. Au delà de ça, du point de vue marketing, je n’ai aucun budget, et je n’en aurai pas d’ici demain. Pour l’instant je fais avec les moyens du bord, avec les réseaux sociaux. La salon des spiritueux à Toulouse (Open Spirits) a beaucoup joué aussi.
C’est quelque chose que je vais développer avec Swell de Spirits, essayer de passer du temps avec les distilleries pour sortir de jolis single casks. Quand tu vois certains Savanna ou autre, qui font des affinages en fûts de calva, ou Jura dans le whisky, il y a pas mal de choses à faire avec l’eau-de-vie de pomme. Il y a des possibilités pour la sortir de l’AOC, et pourquoi pas faire des vieillissements dans des fûts de rhum, de whisky, etc.
Est-ce que le vieillissement doit être fait sur place dans l’AOC Calvados ?
Oui, et puis c’est comme dans l’armagnac et le cognac, ce n’est pas le monde du rhum ou du whisky. Dès que tu sors du fût de chêne français typique, tu sors de l’AOC.
Tu es aussi allé rencontrer Guilhem Grosperrin pour tes embouteillages de cognac…
Sacré monsieur, sacré bonhomme. Il y a des personnes comme ça qui influencent le milieu, et il en fait partie. Il est jeune et il a déjà un gros savoir, une approche super du point de vue de l’affinage. Je te conseille d’aller voir ses chais, il te fera le tour et t’expliquera de A à Z son travail au jour le jour. Ça vaut le détour. Le fait d’avoir eu l’opportunité d’acquérir deux de ses « précieux » est une chance.
On a donc un 65 Borderies, un cru rare. Les Borderies, les Fins Bois et les Bons Bois de 10 ans d’âge, on n’en trouve presque plus. Il y en a 5 à 10 fois moins que des Grande Champagne ou Petite Champagne. Tout simplement parce que la superficie est moins grande, donc il y a beaucoup moins de distillation.
On a aussi un 52-22 Fin Bois qui tout comme le 65 n’est pas millésimé. C’est très compliqué de pouvoir millésimer dans le cognac, au niveau de la paperasse, du suivi du tonneau. Il faut toujours avoir quelqu’un qui vient contrôler et apposer la cire, même si tu dois simplement échantillonner ou sortir ne serait-ce qu’un centilitre. Ce sont beaucoup de surcoûts, et c’est pour ça que les millésimés sont souvent beaucoup plus chers. On ne peut pas exiger ça de petits producteurs, c’est trop compliqué pour eux.
Pour revenir au 65 Borderies, on est sur les hauteurs, sur un chai spécial, d’où venaient les fameux 64 Borderies que Guilhem avait sortis à l’époque et qui avaient fait fureur. C’était le dernier fût de 65, dont j’ai été chanceux d’avoir les dernières gouttes.
« Dans les hauteurs des Borderies, on est vraiment sur les plus beaux terroirs, les plus belles vignes, où l’on sort de beaux distillats. »
On a un degré assez élevé et de la puissance en bouche, car il a dû être mis en fût assez haut, et il a dû vieillir dans un chai assez sec. On a de belles sensations en bouche, avec pas mal de cannelle, d’épices, de caramel, beaucoup de longueur, quelques fleurs, plein de choses pour se régaler.
Pour le 52-22, c’est de l’histoire dans un verre. C’est un assemblage des années 1952 (80%) et 1922 (20%) en Fin Bois, avec plusieurs fûts du même producteur. C’est le 1922 qui amène la fraîcheur, la fleur de cassis, alors que le 1952 est plus robuste, il a plus de puissance, c’est étonnant, car on pourrait penser que c’est l’inverse. Encore une fois, les crus de Fins Bois sont rares, tout comme les Bois Ordinaires, les Oléron…
L’histoire de ce 52-22, c’est qu’un petit producteur avait eu une demande d’une grosse maison (sur laquelle 2pac a fait une chanson…). Cette grosse écurie avait demandé à ce petit producteur local de lui faire un assemblage, avec un cahier des charges à remplir, ce qui était contraignant pour lui dans le passé. Il s’est lancé, au début des années 2000, avec des vieux fûts dont il pensait qu’ils feraient l’affaire. Après avoir travaillé dessus, il est arrivé à ce résultat, la grosse maison était contente, mais elle a finalement décidé de le laisser en plan. Toute la région, dont le père de Guilhem, a eu écho de cette histoire, et celui-ci a voulu goûter ce fameux assemblage. Il a été ravi et a décidé de tout acheter. Pour immortaliser cet assemblage et ses arômes, il a tout mis en dame-jeanne.
J’ai choisi l’une de ces dames-jeannes de 20 litres pour Swell de Spirits, qui a donné 40 bouteilles.
Est-ce qu’il y a d’autres choses qui arrivent bientôt ?
Le Foursquare arrive ce mois-ci, il sera embouteillé en Écosse très bientôt (interview réalisée le 13 janvier 2022, ndlr). C’est là que j’embouteille le Scotch Whisky pour ne pas perdre l’appellation. J’y vais tous les 2-3 mois.
Un Highland Park sera aussi embouteillé très rapidement. C’est un « Secret Orkney » en fût Octave de 50 litres. Il y aura un peu moins de 80 bouteilles. C’est un finish Palo Cortado, un sherry assez rare dont les fûts ne courent pas les rues, et en Octave encore moins. Il est assez funky.
En Allemagne, je suis beaucoup allé dans des salons comme le Limburg, qui est super, avec des sorties spéciales de whiskies single casks. Je suis aussi allé à Frankfort, à Munich, et j’ai goûté pas mal de choses. J’étais notamment tombé sur un Signatory Vintage de 1990 en vieillissement 100 % Palo Cortado, et qui était magnifique.
“C’était vraiment quelque chose qui sortait du lot, et je me suis dit que si un jour je devais faire quelque chose dans le scotch, je ferais un petit truc jeune en Palo Cortado.”
C’est jeune, 2017, mais c’est surprenant, ça se boit très bien. Il y a des notes salines, de la tourbe plus souple, différente de celle d’Islay, plus végétale et fumée. Avec le Palo Cortado, on ne retrouve pas tout à fait l’ADN de Highland Park, c’est sûr, même s’il y a quelques marqueurs. On est sur du « sherry bomb », mais qui n’est pas du PX, qui ne va pas tout dénaturaliser. Pour les Glen Allachie ou les Glendronach comme Billy Walker a fait, les gens veulent la couleur, la concentration, et le PX emporte tout sur son passage.
Ce sera un embouteillage pour lequel il y aura deux écoles. Il plaira ou il ne plaira pas. Tu auras la vieille école qui dira que c’est trop jeune et qui ne sera pas fan du fût Octave. Et puis il y aura ceux qui aimeront le fait de sortir du fût de sherry traditionnel.
C’est aussi ce genre de choses qui fait que tu as une gamme de sélections personnelles, et c’est ce que l’on attend d’un embouteilleur indépendant…
En effet, je n’ai pas trop de limites avec Swell de Spirits. Et puis c’est métier égoïste, je ne cherche pas à plaire à une certaine catégorie, à certains palais. Ça me plaît, et je l’ai fait.
J’avais envoyé un échantillon à Serge Valentin, qui m’avait dit que c’était « spectaculaire ». Il m’a fait un joli retour, mais il m’a quand même dit « évite de m’envoyer des choses comme ça à l’avenir » (rires).
Est-ce que tu as prévu de faire des assemblages dans le futur ?
C’est déjà en cours. L’objectif est d’affiner, d’assembler, notamment dans le scotch whisky. Forcément ce ne sera plus du single malt mais du blended, mais on restera dans cet univers.
Le but ultime est d’ouvrir une micro-distillerie. J’ai une grande passion pour le whisky japonais. Dans le passé, on arrivait plus facilement à avoir du Chichibu, du Hanyu, du Yamazaki, Hibiki, des choses qui me plaisent beaucoup. J’ai beaucoup regardé les procédés, j’aimerais passer du temps au Japon et travailler sur les méthodes de distillation, la fermentation, le mizunara etc. Les matières premières, l’eau, l’altitude, beaucoup de choses rentrent en ligne de compte.
Le but serait de créer une petite distillerie pour faire des choses funky, prendre du plaisir, en appliquant les méthodes de l’ancien temps du scotch whisky d’Islay, tout en intégrant des méthodes japonaises, du mizunara, faire une sorte de melting pot.
C’est quelque chose que l’on voit sur le long terme, c’est encore un rêve, mais j’espère que cela pourra se faire.
« Il y a du vieux rhum qui va arriver cette année, du jamaïcain, du Guyana, et aussi du vieux scotch whisky. »
Cela devrait sortir courant 2022, avec d’autres surprises qui sortent des sentiers battus. Il y a déjà des gens qui font ce genre de choses, comme Guillaume Ferroni et ses grogues du Cap-Vert, ou Anthony de Old Brothers (un vrai passionné et ami) qui est aussi à fond là-dedans et qui fait de belles choses.
Des sujets comme le mezcal m’intéressent aussi. J’ai envie de sortir des surprises avec Swell de Spirits, quitte à me tromper et apprendre. Encore une fois, je ne me mets pas de barrières.
Merci Michael pour cette découverte de ta marque et de ton métier, on attend les prochains embouteillages avec impatience !
Merci à vous de faire ça, parce que ça permet de connaître un peu mieux la personne derrière le projet. Il y a aussi la famille qui me soutient, qui est importante. Kelly, ma femme, est mentionnée également, parce qu’elle me soutient beaucoup. Elle a aussi un palais qui est assez sympa, elle sent bien les choses et elle a toujours son mot à dire sur ce que l’on fait. Dans un projet comme ça, on emmène la famille. Mes parents toujours présents et d’une aide précieuse. Mon frère Yvan m’aide énormément et développe le site web. C’est un projet familial, pour lequel on essaie de gravir les échelons petit à petit.
Je travaille avec Bastien Renard (sur le graphisme, ndlr), qui est impliqué à 300 % et qui est devenu un vrai ami.
Il y a aussi une autre personne, une Anglaise qui s’appelle Fiona Shoop. Elle est dans le scotch whisky et dans le gin, et s’occupe de la radio « Cocktail Hours ». Grâce à elle, j’ai un œil externe sur les dégustations. Je lui envoie des échantillons, et puis pendant 2-3 heures on déguste, on échange. On fait les notes de dégustation, ainsi que la phrase représentative du liquide, qui se trouve sur la bouteille.